22522
post-template-default,single,single-post,postid-22522,single-format-standard,stockholm-core-1.1,select-child-theme-ver-1.1,select-theme-ver-5.1.8,ajax_fade,page_not_loaded,smooth_scroll,wpb-js-composer js-comp-ver-6.10.0,vc_responsive

Régime alimentaire et dépression

Selon de nombreuses études, une consommation insuffisante de « bon gras » (oméga 3) prédisposerait à certaines maladies mentales, dont la dépression. A l’inverse, le fait d’avoir une alimentation saine donne le sentiment d’avoir fait le bon choix et améliore l’estime de soi.

Atlantico : Le gras serait associé à une bonne santé mentale, mais on devrait distinguer les dits « bons » gras des « mauvais ». Comment faire la différence ? Existe-il des aliments types aux effets bénéfiques universels, ou bien ces effets dépendent-ils des profils de chacun ?

Vanessa Bedjai Haddad : On trouve effectivement différents types de lipides (de matières grasses) dans l’alimentation. Ces différents « gras » n’ont pas la même constitution et de fait pas les mêmes caractéristiques et fonctions dans notre organisme. Certains, lorsqu’ils sont consommés en excès, sont qualifiés de « mauvais gras » – on recommande d’en limiter la consommation. Au contraire des « bons gras » dont on privilégiera, précisément, l’ingestion.

Pour faire simple, les acides gras saturés (AGS) et le cholestérol sont souvent qualifiés de « mauvais gras » car la consommation excessive d’aliments qui en contiennent favorise le développement de maladies cardiovasculaires (MCV) par leurs effets athérogènes, thrombogènes et hypercholestérolémiants. Afin de prévenir l’apparition de MCV, nous recommandons de limiter la fréquence de consommation des aliments riches en AGS et en cholestérol que sont : les charcuteries grasses, les viandes grasses, le fromage, le beurre (ainsi que celui des préparations), l’huile de palme et de coprah (que l’on trouve dans certaines préparations industrielles, viennoiseries, pâtisseries, plats cuisinés…).

A l’inverse, les acides gras insaturés (AGI) sont considérés comme des « bons gras » protecteurs car ils préviennent l’apparition des maladies cardiovasculaires par leur effets antiathérogènes, antithrombogènes et hypocholestérolémiants. Parmi les AGI on distingue les acides gras mono-insaturés (AGMI) le plus célèbre étant l’acide oléique (oméga 9) et les acides gras poly-insaturés (AGPI) avec les fameux oméga 3 qui inhibent l’agrégation plaquettaire et donc favorisent la fluidité du sang, préviennent la fibrillation ventriculaire et améliorent la fonction contractile du muscle cardiaque, réduisent le risque coronarien, diminuent l’incidence de certains cancers, participant à la physiologie du système nerveux… et les oméga 6 hypocholestérolémiants, hypotriglycéridémiants, intervenant dans la fonction reproductrice, participe au maintien de l’intégrité de la peau et sont impliqués dans l’activité du système immunitaire et de la réponse inflammatoire. Afin de prévenir l’apparition de MCV en parallèle de limiter la consommation d’AGS et de cholesterol, nous recommandons de veiller à un apport suffisant en omega 3 en consommant des aliments qui en sont riches telsque les poissons gras (thon, saumon, sardines, hareng, anchois) et certaines huiles végétales (colza, noix, lin), graines de lin, fruits à coque, les oeufs de poules nourries aux grains de lin.

Atlantico : Comment expliquer d’un point de vue scientifique que les bons gras (omega 3 ou autres) puissent avoir un impact sur l’état mental d’un individu  ?

Vanessa Bedjai Haddad : Effectivement plusieurs études d’observation, en laboratoires et sur les animaux) montrent qu’une consommation insuffisante d’oméga 3 (principalement l’EPA et le DHA que l’on trouve dans le poisson) prédisposerait à certaines maladies mentales dont la dépression. À l’inverse, les populations consommant beaucoup de poissons présenteraient moins de cas de dépression.

Notre cerveau est particulièrement riche en oméga 3 de type DHA (acide docosahexaénoïque) et EPA (acide éicosapentaénoique). Des études ont montré que le cerveau d’une personne atteinte de dépression contenait moins de DHA que celui d’une personne en bonne santé mentale. Egalement que la concentration sanguine d’EPA était plus faible chez ces personnes. D’où un intérêt depuis pour ces molécules dans le traitement et la prévention de la dépression.

L’ADH entre dans la constitution structurale du cerveau et sa concentration au sein des cellules est liée à la qualité des activités cérébrales. L’EPA issu de l’alimentation a la capacité de se  transformer en DHA et en d’autres éléments également impliqués dans ces activités cérébrales. On ne sait pas encore tout à fait comment ces acides gras aideraient à réduire les symptômes de la dépression. Mais plusieurs mécanismes d’action sont actuellement étudiés. Il semblerait surtout que les oméga 3 présente la capacité de rendre plus perméables les membranes de nos cellules et ainsi de favoriser la formation de vésicules dont le rôle est de transmettre via des neuromédiateurs des informations au cerveau. Un avantage certain pour les fonctions cognitives.

Atlantico : Peut-on entrevoir une dimension psychologique dans la corrélation « bon gras »- lutte contre la dépression ? ( Ex. type : avoir conscience de bien manger engendrerait une bonne estime de soi, et inversement, mauvais gras- fatigue- mauvaise estime de soi …  )

Vanessa Bedjaï-Haddad : Ce Non, pas tellement, les effets sont davantage physiologiques. Il n’y a pas que les oméga 3 qui présentent un effet démontré sur les activités cérébrales et peuvent être corrélés à la santé et au bien-être mental. Certains acides aminés (notamment le tryptophane précurseur de la sérotonine), la vitamine D et certains minéraux tels que le magnésium et le zinc ont des effets positifs sur le bien-être, le sommeil et favorisent le calme et la sérénité. L’idée est d’apporter à son organisme ce dont il a besoin dès le petit déjeuner. Un petit déjeuner faible en sucres (pain complet plutôt que blanc), riche en protéines de bonne qualité (œufs, viandes maigres, produits laitiers) et en AGI (un peu de avocat) permet de limiter la sécrétion d’insuline et au contraire de favoriser la sécrétion de sérotonine directement à l’humeur et au moral.

Atlantico : Le choix de son régime alimentaire peut-il vraiment être considéré comme une cause/ solution à la dépression ? 

Vanessa Bedjaï-Haddad : Ce serait simpliste de le dire ainsi. Mais en effet un régime alimentaire équilibré ou au contraire déséquilibrée peut bien  avoir une incidence sur des dysfonctionnements cérébraux. Un mode d’alimentation de type régime crétois représente un modèle interressant limitant l’incidence des maladies cardiovasculaires et des phénomènes dépressifs de par sa richesse en acides gras insaturés, sa pauvreté en acides gras saturés et la prédominance d’aliments simples non raffinés. L’alimentation crétoise traditionnelle est en effet composée d’une quantité importante d’huile végétale associée à une forte consommation de légumes et de fruits frais ainsi que de graines oléagineuses. Les Crétois privilégient aussi le blé sous forme de pain complet, les fromages frais de chèvre et de brebis, les poissons notamment gras), tandis que les viandes sont peu représentées (1 à 2 fois par semaine au maximum).

Source: Atlantico.fr – Publié le 25 juillet 2016